Ivan Cavallari, nouveau directeur artistique des Grands Ballets Canadiens entre dans la danse de façon grandiose et surprenante. Arrivé en juillet de cette année, il a décidé de proposer, pour inaugurer la saison, un ballet double composé du troublant Stabat Mater, du chorégraphe Edward Clug et de l'hypnotisante Symphonie n.7 de Beethoven du chorégraphe Uwe Scholz.
On ne sait définir le sentiment qui nous habite face à cette création artistique double : réciprocité ou dualité, l'ambiguïté de ces miroirs nous envahit avant que la beauté des gestes ne l'emporte.
C'était un pari osé, mais hautement relevé que de lier ces deux intensités. Nous restons encore subjugués par l'enchantement que ce ballet a su créer.
Stabat mater, "la mère qui se tenait debout" est le chant de la Vierge affligée face à son fils crucifié. Les mots sont durs, pourtant, les pas ne sont pas lourds et le jeu des danseurs est si juste qu'il nous fait dépasser l'empreinte de l'histoire religieuse parfois si funeste. La mise en scène contraste justement avec la gravité du poème médiéval. Le tout est résolument moderne, autant la forme que le fond. Les costumes sont épurés, les corps sont sans fards, la chorégraphie est totalement contemporaine et novatrice. Jamais morbide, jamais désolante. La musique est vibrante, le décor est lumineux. Nous ne sombrons pas dans l'ennui, au contraire, les quarante premières minutes passent à une vitesse folle. Stabat mater enchante l'âme. La vie, l'enfantement, l'accouchement, la crucifixion: plusieurs tableaux nous émeuvent, nous transportent, nous irradient. La maîtrise de la danse est irréprochable, les propositions sont audacieuses. Nous passons un moment au coeur du sacré et de l'éternel, presque mystique. Le souffle de la résurrection l'emporte finalement sur la douleur de la mort et c'est un point de vue si rare qu'il nous ébranle vraiment.
Puis, pour nous remettre de nos émotions, nous apparaît la célèbre Symphonie, contrepoint lumineux dans lequel la perfection, si elle existe, n'est vraiment pas loin. Ce joyau finit par nous convaincre que les Grands Ballets ont ici trouvé une nouvelle voie d'expression du merveilleux. L'échange qui existe entre ces deux chorégraphies réside surtout dans la justesse et la splendeur des pas, des sauts, des mouvements. Tout est incroyable, pointu, vif. Les corps se mélangent, hommes et femmes se confondent et la musique nous transporte. Nous ne sommes pas tout à fait certains de comprendre les liens tissés entre les deux tableaux, mais nous voyons clairement se dessiner des possibilités infinies pour le ballet classique.
Stabat Mater
Jusqu'au 28 octobre 2017
Théâtre Maisonneuve de la Place-des-Arts