Je dois dire que ça fait un bon moment que j'ai envie d'écrire un article sur les tendances 2015, côté bouffe, à Montréal. Je trouve extrêmement intéressant d'observer l'évolution des habitudes alimentaires des gens lorsqu'ils sortent, car même s'il peut s'agir de simples modes passagères, on pousse parfois plus loin et on se rend compte que ces tendances reflètent certaines valeurs sociales. Cependant, même si ma vie actuelle tourne pas mal autour des restaurants, des différents types de cuisine et des nouveautés de la scène culinaire, j'avais tout de même l'impression de vouloir m'attaquer à un sujet trop gros. Genre, «je suis qui moi, M-C, pour dicter les tendances gastronomiques de l'année 2015»? Depuis les dernières semaines, donc, je me suis entretenue avec quelques experts de l'industrie, notamment Pasquale Vari (ITHQ), Normand Laprise (Toqué!), et Hakim Chajar (Laurea), afin de développer mes idées avec eux.
L'attrait pour le «local»
Fait unanime, l'attrait pour tout ce qui est local est grandissant. Les gens veulent savoir ce qu'ils mangent, et ils ont une conscience sociale de plus en plus aiguisée pour les aliments consommés. La mentalité «près de chez soi» s’applique à toutes sortes de produits et services, que ce soit au niveau de ce qui se retrouve dans l’assiette ou des producteurs. En prenant compte de cela, l’Institut du tourisme et d’hôtellerie du Québec a même mis le l’avant dans son nouveau programme, «Formation internationale en cuisine et gastronomie», qui recevra sa première cohorte à l’automne 2015, un volet dédié à la visite de producteurs (fermiers, agriculteurs) directement sur le terrain, et à l’entretient de relations avec ces derniers.
Normand Laprise, pour qui la notion de traçabilité des aliments a toujours été d’une importance primordiale, se dit totalement ravi de la montée de cette tendance. «Après une enfance vécue sur la ferme à goûter des produits qui provenaient de nos champs et de l’étable, la notion de traçabilité était déjà installée. Quand j’ai ouvert Toqué!, il y a plus de 20 ans, la traçabilité des produits était un principe que je suivais naturellement et que je suis toujours sans compromis et de façon presque obsessionnelle. Aujourd’hui, c’est devenu tendance et le principe est adopté par de nombreux cuisiniers et je m’en réjouis. Et dans 20 ans la traçabilité sera encore pour moi un code de vie incontournable.»
Certains restaurateurs favorisent donc les distributeurs spécialisés et locaux, qui gagnent une importante part de marché. Même si les grands distributeurs sont souvent moins dispendieux, on penche pour l’aspect local. Cela se ressent aussi sur plusieurs menus bistros, qui proposent de plus en plus de «comfort food» associé avec le terroir québécois et les recettes originales, comme les pâtés chinois revisités, le mac' & cheese, l’agneau du Québec, le rayonnement des fromages d’ici, les fruits de mer des Îles de la Madeleine, des petits fruits, ou même des bières, vins et cidres locaux, qui sont utilisés dans une variété de préparations.
Photo: Facebook | Les Enfants Terribles
La qualité et le choix des produits
En plus de savoir de quel endroit proviennent les aliments, les consommateurs recherchent également le top de la qualité. Et c’est normal, maintenant que la population est davantage éduquée sur ce qu’elle mange. L’attention et la recherche sont plus grandes, et l’offre des restaurateurs s’étend : mets et boissons santé, options végétariennes, ou sans gluten. Selon Hakim Chajar, l’une des tendances 2015 serait le retour vers la simplicité. «En 2015, on revient à la base, à l'essentiel, à la simplicité. On maintient une direction qui est droite. Cette année sera aussi celle où on met beaucoup de minutie sur le choix de produits de qualité». Ces propos se reflètent dans les assiettes, mais également dans les verres. De plus en plus, on remarque que les cocktails et les boissons se personnalisent. Les liqueurs épicées, les sirops simples, les jus, les thés, les cafés et même les boissons gazeuses (1642 Cola, par exemple) qui sont faits maison gagnent en popularité.
Photo: Facebook | Montréal en Lumière
Les goûts asiatiques qui intriguent toujours
On l’a remarqué l’année dernière avec le nombre impressionnant d’ouvertures d’izakayas à Montréal. Certains blogueurs et journalistes ont même affirmé qu’il y en avait maintenant trop sur l’île. Cependant, on perçoit une particularité dans la cuisine asiatique, qui devient de plus en plus «high-end». Bien entendu, on connaît les ramens et les sushis, et pour être honnête, on est probablement un peu tanné d’en entendre parler et d’en manger, mais on observe une diversification dans l’offre de tels établissements. Lors de ma plus récente visite chez Saka-Ba!, notamment, j’ai pu témoigner d’une recherche et d’une grande originalité dans la préparation du menu : on y retrouve évidemment les classiques ramens, mais mon attention fut captée par des items tels qu’un tartare de pétoncles, une salade de pieuvre au sésame et un tataki de bœuf, tous exécutés à la perfection.
Il y a quelques années, la cuisine asiatique était davantage associée avec la restauration rapide, alors qu’elle prend un tournant différent depuis tout récemment.
Somme toute, on dirait bien que 2015 sera une année où la simplicité et les aliments locaux seront gagnants.