On vous a souvent parlé de Canailles depuis sa métamorphose de groupe de reprises country (les Drunken Sailors, 2009-2010) en pétillante machine à cajun-bluegrass-bluesy francisé, quoique toujours sur le mode de la mention rapide.
Pourtant, le groupe compte présentement parmi les meilleures protagonistes de la ville en plus d’avoir connu une année bien remplie. Finaliste à la dernière édition du concours Les Francouvertes, il passé la majeure partie de l’été en tournée et vient tout juste de compléter l’enregistrement de son premier album avec Josh Dolgin, alias Socalled, à la console. Ce vendredi, l’ensemble donne un dernier concert avant de se retirer quelques mois, soit jusqu’à la sortie dudit opus.
C’était le moment ou jamais de procéder à une entrevue en bonne et due forme. La chanteuse Daphné Brissette et le mandoliniste Erik Evans ont bien voulu répondre à quelques questions.
Vous venez de passer une semaine en studio avec Socalled. Comment ça a été, quand est-ce que ça va sortir et avec qui? Avez-vous réenregistré des pièces de votre EP poilu ou juste du nouveau stock?
Daphné Brissette: Josh a vraiment été cool et patient avec nous. Il aime ça, ça paraît. C’tait comme notre coach: il apportait un avis externe, avec une oreille musicale en plus et il nous motivait sans cesse. Réaliser un album avec 8 personnes, c’est du sport! On a repris trois chansons du EP, celles qui avaient besoin d’un second souffle. Ça laisse les petits bijoux du EP qui doivent rester tels quels, qu’on jugeait déjà parfaits comme ça. La balance de l’album est faite des chansons qu’on roule depuis un an. Ça va sortir vers la fin février. T’sais, le mois où c’est qu’y fait frette! (Note de la gérante: On ne sait pas encore avec qui ça va sortir. On jase avec certains labels, mais on ne haït pas non plus l’idée de sortir ça tout seuls comme des grands.)
Votre concert de vendredi sera votre dernier avant un moment. Pourquoi s’arrêter sur une si belle lancée?
DB: Ça allait de soi. Je pense qu’aucun n’était en désaccord avec l’idée d’avoir un p’tit break avant la suite.
Vous avez beaucoup tourné à travers le Québec ces derniers mois. Moments forts? Anecdotes que vous raconterez à vos petits enfants?
DB: Je pense qu’un des meilleurs moments a été de se réveiller à Saint-Gédéon, pour profiter du soleil et de la belle vue du balcon, puis de constater qu’il y avait Erik et Annie (Carpentier, planche à laver) couchés sur la plage en plein soleil (depuis le soir d’avant). Comment ils se sont rendus là, je n’en ai aucune idée, mais Erik avait les traces de ses mains à travers son énorme coup de soleil couleur homard. Le soir d’après, à Tadoussac, Erik s’est endormi dans le feu. Sinon, Dan Tremblay (guitariste et chanteur) qui crie «Prends du Masking Tape» devant une crowd de matantes assises sur des chaises en plastique à Mont-Laurier un dimanche après-midi. Ça aussi, ça fait partie des beautés de la vie.
Le crowd surfing et la danse en ligne sont maintenant devenus des traditions à vos concerts. What’s next? Le Batman? La lambada?
Erik Evans: Comme on aime être diversifiés, on est passé des deux extrêmes de la danse (body surfing versus les sets carrés). Je crois que dans un futur très rapproché, notre public apprendra «la danse Canailles», une danse qui conviendra parfaitement à une certaine chanson inédite de l’album. Ensuite suivront le breakdance et la tecktonik, danses en plein essor à Tadoussac.
Ça prend quoi pour composer des bons textes country/blues/folk/bluegrass en français?
DB: On n’est pas des chansonniers, personne ne prétend avoir ce statut dans Canailles. J’pense qu’on a quand même quelque chose à dire sur notre présent: on a tous des vies assez mouvementées et on vient tous de milieux différents. Tu te rends compte que la langue à Dan, c’est celle du Saguenay, qui n’est pas la même que celle de Montréal, si je compare à moi ou Alice (Tougas St-Jak, accordéoniste et chanteuse). On a tous des rapports différents avec la langue et c’est ce qui est magique. Écrire du folk en français, c’est pas une tâche facile non plus. C’est facile de sonner pareil aux autres ou limite quétaine, dépendant de la manière dont on interprète les mots.
EE: Pour écrire de bons textes dans notre style, il faut oublier le style pour ne pas refaire les erreurs du passé folk. J’aime notre band du fait que nos accents ne sont pas forcés ni dans le joual, ni dans l’international. C’est plus authentique.
Adamus. Il était dans le band; deux minutes après, il n’était plus dans le band. C’est quoi son deal?
DB : Bernard, son rêve c’est de jouer dans Canailles. Il essaie quand il peut, le pauvre. Nous, on ne lui a jamais rien demandé. C’est devenu un peu notre mononcle malgré lui. Ça serait trop dur pour lui être dans ce band-là en permanence, alors il y est quand son horaire et son foie lui permettent.
La voix à Daphné. C’est quoi son deal?
DB: Hipelaye. Daphné devrait arrêter de fumer.
EE: …de l’hélium.
Trois d’entre vous ont effectué un pèlerinage en Louisiane au début 2011. Qu’avez-vous appris?
DB: Qu’on ne fait pas du Cajun selon les Cajuns, qu’on peut tout bonnement s’asseoir à côté de Zachary Richard sans le reconnaître, qu’on pouvait sortir d’un bar à l’autre avec nos bières et qu’on peut s’y faire de bons amis… Ce qui nous permettra d’ailleurs d’y retourner en avril prochain.
Commentez cette affirmation entendue à quelques reprises à votre sujet: «Canailles, c’est des hipsters qui se la jouent folk.»
DB: Celle-là, je ne l’avais pas entendue! J’avoue que Dan Tremblay se la joue vraiment hipster avec sa pelle-guitare pis sa barbe. Je me suis aussi fait dire que j’étais Bernard Adamus avec des boules. Elle aussi, je l’ai ri.
Vous êtes en nomination (entre autres) dans la catégorie «artiste au plus grand potentiel» au prochain GAMIQ. Le plus grand potentiel de quoi?
EE: Le plus grand potentiel de passer à l’histoire soit par une mort subite tragique ou pour avoir influencé une nouvelle génération de bons buveurs ou yoddeleurs qui sacrent en dansant en ligne avec un charme attachant.
Canailles
14 octobre | Maison de la culture Maisonneuve
4200, Ontario E.
avec Sunny Duval
canailles.bandcamp.com