Aller au contenu
The Flaming Lips: promesses tenues

La musique? Pour plusieurs, c’est un facteur secondaire. Ou, en tout cas, les chansons le sont. On va voir et revoir les Flaming Lips pour la couleur, les confettis, les ballons, les accessoires loufoques, les projections, les sermons ultrapositifs du chanteur Wayne Coyne, la vibe hallucinogène… Ah, et pour la pièce «Do You Realize?», aussi, quand même un peu.

Oui, beaucoup de choses précèdent le quatuor de l’Oklahoma. Le 7 juillet, on peut donc parier que seulement une partie de ce Métropolis quasi comble avait ne serait-ce qu’entendu Embryonic, le plus récent album officiel de la formation. À ces gens, les lèvres ardentes ont tout de même livré un audacieux survol de leurs dernières chansons. Au reste, elles ont encore une fois comblé les attentes et livré exactement ce qui était attendu: du gros, du grand, du pété, du célébratoire, du joyeux, du luisant… Rien de moins!

Après une première partie grisante du combo new-yorkais Fang Island – pensez Weezer époque album bleu interprétant du matériel de Sufjan Stevens… Le disque est ordinaire, mais live, ils jouent fort et avec cœur – ainsi qu’un long changement de scène, des problèmes techniques ont retardé de plus belle l’entrée en scène des Lips, auquel moment Wayne Coyne est venu faire un tour sur scène pour s’excuser et prévenir la foule de ce qui l’attendait («finissez vos bières vite parce que je vais vous sauter dessus dans ma bulle de l’espace!»).

Puis, l’introduction tant attendue: des images psychédéliques projetées sur un écran qui remplissait l’arrière-scène, montrant une femme nue dansant. La femme s’étend, écarte les jambes, gros plan sur son sexe lumineux… Une porte s’ouvre et c’est de rien d’autre qu’un vagin psychédélique géant que multi-instrumentiste Steve Drozd, le batteur Kliph Scurlock et le bassiste-guitariste Michael Ivins sont sortis, un à un! Après quoi Wayne Coyne est entré dans sa fameuse «bulle de l’espace» (une énorme sphère de plastique gonflable) et a fait sa traditionnelle promenade à même les têtes de l’assistance. Danseurs costumés de part et d’autre de la scène, averses de confettis et de ballons, éclairages colorés… Le cirque était lancé!

Conformément à ce qu’indiquaient les setlists des escales précédentes de la tournée, glanés ça et là sur Internet, le répertoire était principalement tiré des deux derniers albums du groupe, Embryonic (2009) et At War With the Mystics (2006). Si quelques chanceux qui sont arrivés tôt ont apparemment pu entendre «Waiting for a Superman», tiré de The Soft Bulletin, durant le test de son, aucun extrait de cet album charnière n’était au programme. Une déception, certes, à laquelle les Lips ont cependant pallié avec une sélection relativement aventureuse. «Worm Mountain», «Silver Trembling Hands», «The Sparrow Looks up at the Machine», «See the Leaves» et autres «In the Morning of the Magicians» n’ont en effet rien de tubes rassembleurs. On parle plutôt de la facette la plus musicalement touffue du groupe.

Mais avec leur formule scénique à toute épreuve, les Flaming Lips peuvent transformer n’importe quelle bizarrerie en célébration, et c’est ce qu’ils ont fait. Coyne n’a pas manqué de sortir ses énormes poings en plastique, désormais plus gros que jamais; puis de parler d’amour et de paix sans tomber dans le quétaine ni le hippie, tandis que des techniciens continuaient de projeter des énormes ballons multicolores dans la foule. Lorsqu’un malin les crevait, une explosion de confettis survenait.

Cela dit, tout n’était pas qu’étrangeté, musicalement parlant. La bande a assez tôt ressorti «She Don’t Use Jelly», vieux classique tiré de Transmissons from the Satellite Heart (1993), tandis qu’«I Can Be a Frog», extraite d’Embryonic, a fait l’objet d’un amusant jeu lors duquel le public devait imiter des bruits sur l’ordre des membres (pour remplacer les imitations que Karen O, des Yeah Yeah Yeahs, livre sur la version studio). «Yoshimi pt. I», extraite de Yoshimi Battles de Pink Robots (2002), est une autre grosse toune pop qui a fait chanter. Quant à LA chanson, «Do You Realize?», elle a bien évidemment été servie en rappel, sur fond de synthés émotifs et de nouvelles averses de confettis et de ballons. Je ne cacherai pas avoir versé quelques larmes.

Plusieurs, dont Wayne Coyne lui-même, qui a souvent tenté de fouetter les troupes à coups de «Come on!» insistants, ont trouvé le public plutôt calme, passif. Flegme montréalais ou simple abandon au délire ambiant? Chose certaine, les Flaming Lips n’ont pas failli à leur réputation, lors de cette nouvelle visite, en plus de donner un petit quelque chose de plus aux fans de leur côté plus piquant.

Les inconditionnels de The Soft Bulletin peuvent se rassurer: il paraît que le groupe souhaite éventuellement consacrer une tournée entière à la recréation de l’album. Croisons les doigts!

 

Plus de contenu